Délire ou dé-lire ?
Quoi de plus banal qu’un salon du livre ? Des auteurs qui attendent, des badauds qui passent comme on visite négligemment un musée. Voici deux photographies prises le même jour au même endroit, sorte d’histoire sans paroles destinée à ceux pour qui le livre signifie encore quelque chose et que chacun complètera comme il veut…
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livre
À propos de LAURENT JEANNIN
Depuis plus de 30 ans, Laurent Jeannin parcourt le monde à la découverte de sa plus grande richesse : ses peuples. Il fait souvent le grand écart entre l'Amérique du sud et l'extrême orient sans pour autant négliger l'Europe et bien sûr la France. La photographie est son mode d'expression favori, qu'il conjugue sous forme de diaporamas en fondu enchaîné et sous forme de photographies noir et blanc dont il assure lui-même le traitement.
"L'acte photographique n'a de sens et d'intérêt que parce qu'il me permet de comprendre le monde, ni plus ni moins. Photographier ce qu'on pense rend aveugle, penser à ce qu'on photographie rend borgne. Alors je préfère me laisser surprendre par la vie : le hasard compose, je dispose."
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18 juin 2015 à 8 08 44 06446
« Mon seigneur, je vous en prie, dédicacez moi ce livre ! »
« Bien sûr, mon brave, bien sûr… »
L’indifférence hautaine des auteurs qui semblent chacun occupé à gribouiller quelque chose, quelques mots… destinés à qui ?
Et cet homme, dans cette attitude étrange de prière ou de soumission… on est là pour promouvoir ses écrits, vendre ses livres certainement… et pourtant, la seule personne qui semble encore s’intéresser à cet objet en voie de disparition (voir la fillette qui dans un coin de cet espace dédié aux livres, s’isole dans sa console de jeux numériques), cet unique client donc, doit supplier pour que, dans cette diagonale de fous, on daigne lui accorder un peu d’attention et lui vendre un livre !
18 juin 2015 à 12 12 06 06066
Il ne faut pas se fier aux apparences : cette génuflexion déférente est apparemment due à la hauteur insuffisante des tables pour un dialogue confortable avec l’auteur. Ceci dit, ces deux photographies sont l’anti-reflet l’une de l’autre : quand l’adulte est prêt à s’agenouiller devant l’auteur pour une dédicace, la jeune fille en revanche ne portera même pas un regard sur les livres, même estampillés « littérature jeunesse ». Est-ce une question de génération (ce qui serait dramatique) ou seulement d’âge ? C’est une question d’éducation en tout cas. L’avenir nous le dira…
Quant à l’attitude des auteurs, il ne faut pas s’y tromper non plus : hormis les vedettes, souvent condescendantes dans leur tour d’ivoire, mais adorées malgré cela par un public dévot uniquement parce qu’elles sont reconnues et promues à grand renfort de médias par le système, beaucoup d’auteurs dans l’ombre (mais néanmoins de qualité) se désolent de ne pas rencontrer de lecteurs en voyant défiler les badauds perdus dans leur ennui…